jeudi 31 mars 2011

Une guerre totale

Jean-Luc Mélenchon (meilleur candidat unique du peuple de gauche en 2012, c'est dit) et ses camarades de la GUE au Parlement Européen apportent, au fond, un soutien de principe à l' action de l'ONU en Lybie. Problème.

JLM, qu'on a connu moins hésitant, s'en explique dans son dernier billet, "lendemain de vote".
L'ONU qu'il voit comme un "point d'appui" via ses branches progressistes (CNUCED, PNUD, etc.) formerait la base  "certes très imparfaite " donc réformable (?) d'un " ordre légal " (sic) qui viendra plus tard. Un ordre juste (sic) international qui s'édifiera sur une base plus démocratique et équitable...
On ne le suit pas du tout sur ce point. C'est d'ailleurs sur ses  positions de politique étrangère, ou vis-à-vis de la Chine ou de Cuba, qu'il est le moins suivi...

L'ordre Onusien, comme il dit, est discrédité depuis belle lurette aux yeux des peuples martyrs, ou simplement de la foule des partisans d'une paix juste et durable entre les peuples et les nations. Il est l'instrument docile du gendarrme américain et, secondairement sur ce dossier brûlant, aussi parce que ça relève avant tout de l'aire géostratégique occidentale, des autres membres consentants du Conseil de Sécurité. Point.

Sauf qu'à y mettre le doigt, même avec des réserves... vient l'heure de vérité. Et elle est là : il est trop tard pour reculer. A partir d'aujourd'hui jeudi 31 mars, la direction des opérations passe intégralement à l' OTAN depuis son QG de Naples, et à la CIA de triste mémoire. Aujourd'hui l'objectif clairement affiché est de renverser un régime par les armes. Une fois de plus, ce sont les boys qui finiront le boulot. Ce but de guerre ne figure évidemment pas dans la résolution 1973, pas plus que la statégie de la guerre totale qui est maintenant appliquée sur le terrain (1). Et le secrétaire général de l'OTAN est formel : "il n'y aura aucune aide militaire aux insurgés lybiens" .... Tous rangés derrière les militaires américains !

Le co-président du PG écrit  :
"Refuser de reconnaître une place et une légitimité à l'ordre onusien c'est de fait renoncer à l'application de multiples résolutions exigeant la reconnaissance d'un Etat palestinien ayant des frontières sûres, par exemple. Ou encore les résolutions votées chaque année par l'Assemblée générale de l'ONU, qui demandent la fin du blocus états-unien contre Cuba. Ne pas s'appuyer sur l'ordre international légal incarné par l'ONU c'est accepter que la résolution faisant du droit à une eau potable salubre et propre un droit fondamental et les résolutions protégeant l'enfance ou les personnes LGBT, votées, ne soient pas mises en œuvre. Enfin, nier l'ONU c'est également valider les interventions des Etats-Unis en Afghanistan en 2001 et en Irak en 2003 toutes lancées sans mandat international."

Renoncer à l'application des bonnes résolutions de l' ONU ? c'est une plaisanterie ? Cet argument peut se retourner : Reconnaître une place et une légitimité à l'ordre onusien, comme il dit, et sa primauté dans le règlement des conflits, revient à reconnaître le deux poids deux mesures qui est la règle depuis sa création, jamais l'exception, (cf les révolutions arabes) et à donner le mot de la fin au bourreau israélien, à la pétromonarchie saoudienne, et au tsar de toutes les Russies !
Il y a des résolutions de l' ONU baffouées sur l' Etat palestinien, et alors ? On s'en réclame, on s'en revendique, on fait feu de tout bois avec, on leur met le nez dans leur caca, mais peine perdue. Aucune solution ne viendra de ce côté, à moins d'abattre le Pentagone.... mais ça ne le trouble pas plus que ça.

Et je m'associe à cette question de l'un de ses lecteurs, "Guerillero31" (32) : " Pourquoi Camarade Jean-Luc ne pas demander une exclusion aérienne au dessus de Gaza pour protéger la population palestinienne ? ou des frappes sur l'Arabie saoudite quand on y réprime des mouvements sociaux ? "

JLM poursuit :
"Les puissants de ce monde cherchent à se débarrasser de l'ONU, pour réinstaller la loi du plus fort. Pendant les années Reagan, puis sous les Bush, tous les moyens furent bons pour discréditer cette organisation et même la faire mourir. Il y eut ainsi des années de contentieux sur le non versement par les USA de leur part de contribution au budget de l’ONU. A l’heure actuelle encore c’est sur l’ONU que nous pouvons nous appuyer pour stigmatiser le refus de certains pays d’appliquer des dispositions de l’ONU. (sic ndlr) J'en prends pour exemple la non reconnaissance par les Etats-Unis, la Libye, le Maroc ou encore l'Egypte de la Cour Pénale Internationale, pourtant en capacité de juger les responsables de crimes de guerre, de crimes d'agression et de crimes contre l'humanité."

La Cour Pénale Internationale est une création utile, mais essentiellement habilitée à se saisir du cas d'individus coupables de crimes de guerre, elle ne juge pas des régimes souverains, et encore moins les régimes qui leur apportent leur soutiens, si l'on suit bien le fil de la pensée melenchonienne nourrie d'universalisme, c'est un peu court, et pourtant ... Qu'ont trouvé ceux qui ont osé fouiller davantage sous les cadavres au Rwanda ? Les Casques Bleus de l' ONU et la France.(2)

Sous la domination de l'empire américain et de ses alliés occidentaux, les résolutions politico-diplomatiques ne sont que des chiffons de papier chaque fois qu'il pourront prendre ou reprendre pied dans une région du monde en révolution. Réaffirmant un soutien sans faille à tous les peuples en lutte pour la liberté, cette gauche doit très vite retenir la leçon.
JMB

Notes.
1. Cette stratégie et les moyens afférents sont détaillés par le journaliste François Bonnet dans son article , "Lybie, la guerre est déjà hors contrôle" Mediapart, 31/03/2011

2. On pourra lire à ce sujet, de Xavier Verschave, "La Françafrique, le plus long scandale de la République"

Eté comme hiver, un droit c'est un droit

Jo Briant
Porte-parole de la Coordination iséroise de soutien aux sans papiers
c/° CIIP- Maison des Associations
6 bis, rue Berthe de Boissieux
38000   Grenoble
Grenoble le 31 mars 2011

Monsieur Eric Le Douaron
Préfet de l’Isère
Place de Verdun
38000   Grenoble


LETTRE OUVERTE au Préfet de l’Isère

Monsieur le Préfet,

Mercredi 30 mars était appelé par 25 organisations associatives*, syndicales et politiques un rassemblement Place de Verdun  intitulé « NUIT SOLIDAIRE », en solidarité avec les centaines de personnes –familles comme isolés, demandeurs d’asile ou de séjour – dont l’hébergement hivernal prend fin et qui risquent fort d’être à la rue, soit dans l’immédiat soit à court terme, puisqu’il n’est question que d’un relogement partiel pour une durée maximale d’un mois. Notre mot d’ordre, qui reprend ce qui est affirmé par la Déclaration universelle des Droits de l’Homme comme par notre Constitution et de nombreux textes internationaux, était : «ÉTÉ COMME HIVER UN TOIT, C’EST UN DROIT ! ».  Depuis les années 2 000 de nombreux rassemblements de ce type se sont déroulés Place de Verdun, y compris des « nuits solidaires » avec abris et tentes, sans que cela pose le moindre problème.

Dès le début de ce rassemblement les forces de police nous ont signifié de multiples interdictions : pas de tentes, pas de matelas ou même de sacs de couchage ( !), pas d’affichettes A3 reprenant le mot d’ordre ci-dessus que nous voulions tout simplement suspendre sur une corde tendue entre deux arbres ! Et enfin, cerise sur ce gâteau liberticide, interdiction de rester au-delà de minuit .

Des membres de nos organisations, révoltés par ces interdictions aussi absurdes qu’attentatoires aux libertés élémentaires, ont osé dresser une tente, comme l’ont pourtant fait à de multiples reprises dans plusieurs villes les Enfants de Don Quichotte ou des membres d’Emmaüs ou encore de Médecins du Monde, et alors même que des dizaines de femmes, d’enfants, d’hommes vivent dans des conditions très précaires sous des tentes à Grenoble Ce simple geste a suscité aussitôt une charge brutale sans sommation- d’une trentaine de policiers, fumigènes à l’appui. Lors de deux autres charges brutales, un manifestant qui attendait stoïquement et pacifiquement cette « vague » policière a été traîné à terre et emmené à l’hôtel de police, où il est resté, contrairement aux promesses d’une responsable de la police, jusqu’au lendemain matin à 10H30, accusé d’une façon absurde de « rébellion » ! En outre, trois autres manifestants ont été blessés, notamment à la tête. S’il est une évidence qui a frappé toutes les personnes et observateurs présents, c’est le contraste saisissant et manifeste entre le comportement agressif et violent de votre police et le comportement constamment pacifique et non violent des 150 militants associatifs présents.

Monsieur le Préfet, je n’hésite pas à vous dire, et tous les militants pacifiques associatifs présents diraient la même chose, que les ordres que vous avez donnés aux forces de sécurité et les interdictions multiples que vous leur avez demandé de nous imposer constituent une grave atteinte aux libertés et aux droits d’expression et de manifestation. Cette dérive sécuritaire aurait-elle pour but d’occulter les manquements à votre devoir légal d’assurer un toit, notamment aux demandeurs d’asile ? Toujours est-il que nous continuerons inlassablement d’exiger un toit pour chaque femme, chaque enfant, chaque homme : nous n’accepterons jamais qu’ils soient jetés à la rue et exposés à l’insécurité la plus extrême. Vous savez que vous pouvez user de votre droit – votre devoir – de réquisition, ce ne sont pas les logements vides, publics et privés, qui manquent.

Croyez bien, Monsieur le Préfet, à notre volonté et à notre entière détermination afin que soient respectés les droits et la dignité de tout citoyen, qu’il  soit étranger ou français.

Pour la Coordination iséroise de soutien aux étrangers,

Jo Briant
Grenoble, le 31 mars 2011 


* AC !contre le chômage- ADA (Accueil demandeurs d’asile)- ADES-  APARDAP- ATTAC Isère-  Centre d’Information Inter-Peuples- CIMADE- Collectif de soutien aux réfugiés algériens- Europe-Ecologie/Verts Isère- FASE 38-  GO Citoyenneté-   La Patate chaude- Ligue des Droits de l’Homme-  Les Alternatifs- LSD [Ligue des travailleurs sociaux en danger]-  NPA- PAS Pour une Alternative Syndicale]- Pastorale des Migrants- Parti socialiste-   PCF Isère- PCOF-   Rasl’Front Voiron et Grésivaudan-- RESF 38- RUSF 38- Solidaires 38- Sud Education 

lundi 28 mars 2011

Soutien aux peuples arabes en lutte Non aux bombardements en Libye

Communiqué de Via Campesina

" Depuis la Tunisie et l’Egypte, jusqu’au Yemen et à la Syrie, en passant par Bahrein et l’Arabie Saoudite, les peuples se lèvent en masse pour mettre à bas des régimes autoritaires, dictatoriaux.. Depuis maintenant plus d’un mois des centaines de milliers de libyens sont descendus dans la rue pacifiquement, d’abord, pour réclamer la fin du régime de Khadafi
Le régime de Khadafi est resté sourd et a choisi la logique du pire. C’est lui qui porte la responsabilité des morts et du sang versé en Libye. En choisissant le bombardement des villes et le massacre des populations civiles, il a lui même donné l’opportunité que l’impérialisme occidental attendait pour pouvoir tenter de reprendre la main dans la région.
Aujourd’hui, la France, les Etats-Unis, le Canada et la Grande-Bretagne, sont engagés dans une opération d’invasion de la Libye. Après avoir regardé pendant des semaines le peuple Libyen se faire massacrer et en se gardant bien d’organiser une pression politique internationale nécessaire pour sortir de l’impasse, ils se font passer aujourd’hui pour des sauveurs.
Les premiers bombardements des infrastructures libyennes à Tripoli et ailleurs ont déjà commencé. Les bombardements occidentaux vont continuer de manière à pouvoir soit préparer une occupation sous bannière ONU de la Libye, soit, au mieux, à permettre de choisir et d’imposer les interlocuteurs de l’opposition qui seront les plus favorables aux intérêts occidentaux.
Cette opération militaire en Libye, sert aussi à faire diversion : pendant ce temps là, la répression au Yemen, à Bahrein, et ailleurs continue.
La Via Campesina demande que la volonté des peuples soit respectée.
La Via Campesina demande un arrêt immédiat de l’intervention militaire occidentale.
La Via Campesina demande à tous et à toutes de se mobiliser pour une solution pacifique à la crise libyenne."

le 28 mars 2011

 ---
Qui est Via Campesina ?

La Via Campesina est le mouvement international créé en 1993, elle rassemble des millions de paysannes et de paysans, de petits et de moyens producteurs, de sans terre, de femmes et de jeunes du monde rural, d'indigènes, de migrants et de travailleurs agricoles…  Elle défend l'agriculture durable de petite échelle comme moyen de promouvoir la justice sociale et la dignité. Elle s'oppose clairement à l'agriculture industrielle et aux entreprises multinationales qui détruisent les personnes et l'environnement.
La Via Campesina regroupe environ 150 organisations locales et nationales dans 70 pays d'Afrique, d'Asie, d'Europe et des Amériques. En tout, elle représente environ 200 millions de paysannes et de paysans. C'est un mouvement autonome, pluraliste et multiculturel, sans affiliation politique, économique ou autre.

samedi 26 mars 2011

Verbatim : Les corbeaux

Il s'appelle Jean-Claude Delcourt. Il a la cinquantaine, travaille dans l'informatique. Il est candidat du FN dans le canton rural de Viarmes (Val-d'Oise). Au premier tour, il a amassé plus de 25% des voix. Mais personne ne l'a jamais vu. Elus, commerçants, habitants font tous la même réponse: «On ne sait pas qui c'est.» «Il est inconnu au bataillon. On ne voit que la bobine de Marine Le Pen sur les affiches!», dit Dominique Sainte-Beuve, le premier adjoint (UMP) de Belloy-en-France, où le frontiste a recueilli près de 43% des voix.
«Ce sont des candidats corbeaux!», ironise Vincent Byrche, le suppléant socialiste de la candidate d'Europe Ecologie-Les Verts, qui explique que «dans le Val-d'Oise, le FN a eu du mal à trouver des candidats». Il croit bien avoir aperçu son adversaire une fois, mais il n'en est pas sûr: «Avec ma candidate, on a fait le tour des bureaux de vote, le 20 mars. Un type parlait avec un conseiller municipal. Il nous regardait. Il souriait. Je suis allé me présenter à lui, il n'a pas donné son nom. Je suis sûr que c'était lui.»
 Marine Turchi Carine Fouteau Michaël Hajdenberg pour MEDIAPART, edition du 25 mars

jeudi 24 mars 2011

Va-t-en guerre, dégage !

Depuis son élection il gouverne seul avec une équipe à sa botte, il fait la chasse aux sans-papiers, il détruit le droit du travail, il affame les plus pauvres et taxe les autres, il précarise les jeunes, il marchandise la santé, il couvre toutes les brutalités policières, il promeut le tout nucléaire, il vend des armes à Kadhafi, il envoie Fillon rassurer la pétromonarchie saoudienne*, il méprise toutes formes de participation à la vie collective (parlement, sénat, syndicats etc... )  il envoie les matraques, flash-ball, taser, contre des jeunes et de simples salariés, il pousse les ouvriers dans les bras de lapen. 

Et il a le culot de prétendre faire œuvre humanitaire en Lybie...
C'est notre petit Kadhafi à nous.


JMB


* les 12 et 13 février 2011.

mercredi 23 mars 2011

Une politique de la canonnière

«Je ne crois pas aux bombardements pour instaurer la démocratie» 

Interview de Rony Brauman à Libération



Rony Brauman est ancien président de Médecins sans frontières. Professeur associé à Sciences-Po, il réfléchit depuis des années aux effets des interventions humanitaires.
Une partie des opposants à l’intervention américaine en Irak soutiennent cette fois la résolution du Conseil de sécurité sur la Libye. Pas vous. Pourquoi ?
Parce que je ne crois pas plus qu’avant aux vertus de bombardements aériens pour installer la démocratie ou «pacifier» un pays. La Somalie, l’Afghanistan, l’Irak, la Côte-d’Ivoire sont là pour nous rappeler aux dures réalités de la guerre et de son imprévisibilité. «Protéger les populations» signifie, en pratique, chasser Kadhafi et le remplacer par un Karzaï local si l’on va au bout de la logique, ou diviser le pays en gelant la situation. Dans les deux cas, nous ne serons pas capables d’en assumer les conséquences. A quel moment cette guerre sera-t-elle considérée comme gagnée ?
Faut-il assister en spectateur à l’écrasement de la rébellion libyenne par les troupes de Muammar al-Kadhafi ?
Non. Entre la guerre et le statu quo, il y a un espace d’actions : la reconnaissance du Conseil national de transition [l’instance politique des insurgés, ndlr] par la France était un geste politique important, qu’il faut poursuivre en soutenant militairement l’insurrection : lui fournir des armements et des conseils militaires pour rééquilibrer le rapport des forces sur le terrain, ainsi que des informations sur les mouvements et préparatifs des troupes adverses. L’embargo commercial, l’embargo sur les armes et le gel des avoirs du clan Kadhafi sont autant de moyens de pression auxquels le régime de Tripoli ne peut être indifférent.
Ne risque-t-on pas de laisser faire une tragédie ?
Prenez le Rwanda, souvent invoqué comme un exemple de ce qu’il ne fallait pas faire : l’ONU avait des soldats et les a retirés avant le génocide, ce qui est retenu comme la grande faute. Mais, pour compréhensible qu’elle soit, cette critique morale est aveugle au fait que, pour changer le cours des choses, il aurait alors fallu établir une tutelle complète sur le pays, ce qui est impossible. Selon moi, notre tort n’a pas été le retrait en 1994, mais l’intervention en 1990 pour sauver le régime en place, sous l’illusion de pouvoir imposer la paix. Il valait mieux accepter les violences du moment que de geler, pour un temps forcément limité, le rapport de forces. Ce sont les plus radicaux des deux côtés qui en ont tiré profit.
Même si l’on se contente d’interventions aériennes ?
Une opération aérienne n’a jamais permis de remporter une guerre. Cette illusion technologique relève de la pensée magique. Le bilan des interventions armées internationales montre que nous n’avons plus les moyens de décider ce qui est bon ou pas à l’étranger. Le remède est pire que le mal. A partir du moment où la force ne nous permet plus de faire avancer à notre convenance une histoire qui hésite, mieux vaut en éviter l’usage et rompre avec les rêves de la «guerre juste». En cette matière comme en d’autres, la politique de l’émotion est très mauvaise conseillère.
Est-ce une opposition de principe à toute intervention ?
Non, les Brigades internationales parties combattre en Espagne aux côtés des républicains, en 1936, sont un grand moment de solidarité internationaliste - mais sûrement pas de défense des libertés démocratiques ! - et j’applaudirais des deux mains l’idée de brigades internationales allant soutenir la rébellion libyenne. Mais les interventions étatiques sont une tout autre affaire ! J’ajoute que la morale est loin de trouver son compte dans les choix de situations justiciables d’une intervention internationale par rapport aux populations que l’on abandonne à leurs oppresseurs : la Tchétchénie, la Palestine, le Zimbabwe, la Corée du Nord, etc. Pour ne prendre qu’un exemple récent : parmi ceux qui appellent à une zone d’interdiction de survol au-dessus de la Libye, combien auraient défendu la neutralisation des forces aériennes israéliennes en janvier 2009 sur Gaza ou en août 2006 sur le Liban ?
Il n’y a donc pas de diplomatie des droits de l’homme possible ?
Allez demander aux manifestants du Bahreïn, réprimés par nos alliées les monarchies pétrolières du Golfe, ce qu’ils en pensent. Les Iraniens pourraient bien s’intéresser à leur tour à la défense des droits de l’homme dans la péninsule arabique. Non, les droits de l’homme ne sont pas une politique, et l’opposition canonique entre droits de l’homme et realpolitik est une impasse. Il y a une politique tout court, qui est l’art de vouloir les conséquences de ce qu’on veut. Les droits de l’homme sont convoqués ou révoqués à leur guise par les Etats.
Que dites-vous aux Libyens qui appellent l’Occident au secours ?
Je leur dis qu’ils se font des illusions sur notre capacité à redresser la situation à leur profit et que ce sont eux qui en paieront le prix fort. Souvenez-vous que, en 2003, de très nombreux Irakiens étaient en faveur d’une intervention armée. Ils croyaient que les Américains couperaient la tête du tyran et s’en iraient. Les médecins savent, mais pas seulement eux, que donner l’illusion d’une protection peut être pire que ne pas donner de protection.
La reprise en main de la Libye par Kadhafi, n’est-ce pas la fin du printemps arabe, voire une menace sur les révolutions tunisienne et égyptienne ?
Je ne vois pas pourquoi. D’une part, ce n’est pas la situation en Libye qui déterminera à elle seule l’avenir démocratique des pays arabes ; d’autre part, on voit qu’à l’ombre de l’intervention en cours la répression s’abat sur d’autres manifestations dans les pays du Golfe. Par ailleurs, nous sommes bien placés, en France, pour savoir qu’entre la révolution et la démocratie, il y a du chemin à faire et des retours en arrière. Le printemps arabe n’échappera sans doute pas à cette règle. Je suis convaincu que le rejet des pouvoirs despotiques et corrompus est profondément inscrit dans l’ensemble des sociétés contemporaines, mais que c’est à elles de faire de ce rejet un programme politique.

Recueilli par Éric Aeschimann.

mardi 22 mars 2011

Pas en mon nom !

La guerre en Libye, l’occupation militaire étrangère au Bahrein et l’anéantissement des révolutions arabes : Pas en mon nom ! 

par  Mogniss H. Abdallah, article paru dans La Gauche, hebdo de la LCR,  section belge de la Quatrième Internationale.



Ainsi donc, le laborieux débat sur l’instauration d’une « zone d’interdiction aérienne » en Libye a débouché sur une résolution de l’ONU qui constitue un feu vert pour un engagement militaire international en Libye. Sans « occupation » militaire terrestre, est-il précisé. Simultanément, l’armée saoudienne et la police émiratie débarquent au Bahrein pour participer à l’écrasement d’une révolution démocratique et pacifique : un assaut militaire a été donné mercredi 16 mars 2011 pour démanteler le campement sur la place de la Perle, renommée place Tahrir en référence explicite à la révolution égyptienne. Des hélicoptères ont tiré sur le peuple : il y a des morts, des dizaines de blessés qui ne peuvent accéder à l’hôpital de Manama assiégé par l’armée et les blindés saoudiens. Le pouvoir instaure la loi martiale et procède à l’arrestation de figures de l’opposition démocratiques, chiites et sunnites. Au Bahrein donc, on répond à un mouvement de lutte pour les droits civiques par la répression sous occupation militaire étrangère... et sous le regard de la Ve flotte U.S. qui y dispose déjà d’une base navale.
Certains pays, comme les Emirats-Arabes-Unis qui participent ouvertement à l’occupation militaro-policière du Bahrein, se sont aussi portés volontaires pour l’intervention internationale en Libye. Ainsi, des régimes directement impliqués dans la répression dans un pays arabe, prétendraient agir contre répression et massacres dans un autre pays arabe ? Quelle hypocrisie ! Les militants de la solidarité internationale ne peuvent cautionner sous aucun prétexte cette duplicité qui menace l’avenir des révolutions démocratiques en cours dans l’ensemble du monde arabe, arabo-berbère et africain.
En tout cas, et au-delà de la nécessaire évaluation des intérêts géo-stratégiques complexes en jeu, nous devrions nous interroger sérieusement sur notre rôle dans la situation actuelle. Comment pourrions-nous nous réjouir devant la militarisation croissante en Libye et ailleurs ?
Je voudrais le dire franchement aux amis libyens sincères dans leurs aspirations à la liberté : nous condamnons inconditionnellement les massacres des populations en Libye par Kadhafi et son régime. Mais je suis outré par les slogans « One, two, three, Viva Sarkozy » clamés à Benghazi, et par l’association du Conseil National de transition avec le va-t-en-guerre Bernard Henri Lévy. Amis libyens, je voudrais aussi vous entendre condamner clairement les exactions racistes et les menaces à grande échelle à l’encontre des migrants noirs africains, égyptiens et autres, qui composent 1/4 de la population du pays. Je voudrais vous voir soutenir l’ensemble des peuples en lutte, à commencer par ceux du Bahreïn et du Yémen, aujourd’hui victimes d’une répression terrible menée avec la complicité directe de ceux qui prétendent par ailleurs vous venir en aide.
Amis de la solidarité internationale, lorsque nous soutenons le peuple libyen, ne taisons pas notre solidarité avec les luttes de tous les peuples arabes. Et n’ayons pas peur du débat contradictoire entre nous, y compris avec nos camarades libyens. Pas d’unité à minima ! Ne soyons pas complices de la balkanisation de la Libye et des pays de la région. Souvenons-nous aussi du précédent d’une Somalie démantelée sous les auspices d’une intervention militaro-humanitaire internationale sous le joli nom de « Restore hope », Restaurer l’espoir...

Mogniss H. Abdallah, Paris, 18 mars 2011
Egyptien, Mogniss H. Abdallah est écrivain, réalisateur et producteur

lundi 21 mars 2011

Grenoble : La banlieue rouge vire au bleu marine

Surprises en série au premier tour de scrutin pour les cantonales dimanche soir : aucun des 3 cantons renouvelables à Grenoble en 2011 n'a résisté à la poussée du Front National, pas même le canton 3, fief socialiste. Dans ces cantons les scores écolos sont élevés, et confortent clairement la progression ou l'enracinement des Verts. Dans le canton 3 une autre gauche réussi même sa percée avec Sadok Bouzaïenne et Nicole Pignard-Marthod, que nous évoquions dans le dernier billet. C'est bien la seule véritable lueur d'espoir, qui ne peut que nous encourager à renforcer par tous les moyens le combat pour l' unité à gauche, dans un Front de gauche programmatiquement et politiquement indépendant de la social-démocratie (et ses alliés verts).
Dans le Nord du département le FN se porte comme un charme, ça sent la fin de règne partout pour les vieux notables UMP.
Certes les baronnies locales, de droite ou de gauche, résistent encore un peu. Impressionnant est le score du président  sortant Vallini, réélu à Tullins avec plus de 65% des voix...
Mais dans l'agglomération grenobloise et au fil des scrutins, le souvenir de la fameuse ancienne banlieue rouge s'estompe rudement, et ne sera demain qu'un souvenir au train où vont les choses. C'est  une victoire à la Pyrrhus pour la gauche, qui sort en tête, mais fragilisée par une première, la poussée d'un FN conquérant, en position de se maintenir partout au second tour du scrutin.
Saint Martin d'Hères, Fontaine, Echirolles se rendent. Dans ces communes populaires comme à Marseille et ailleurs, ce n'est pas seulement le peuple de droite qui souhaite changer de chef mais le peuple tout court...à droite toutes.

Au plan national, la victoire sans appel du PS, grand gagnant en voix de ce premier tour de scrutin, ne saurait masquer les reclassements de grande ampleur à l'oeuvre à droite et dans l'ensemble de la société. Et il n'est pas du tout écrit que celui ci l'emportera aux poings (avec un G) dans les scrutins ultérieurs.

Partout le FN égale ou dépasse en poids électoral une droite classique qui s'effondre. Le partage des taches à droite s'est déroulé sous nos yeux  : Sur le versant sécuritaire et xénophobe,  Sarkozy et sa clique se sont activés sans relâche à sa renaissance depuis des mois. le FN n'avait qu'à occuper le versant social, sur la base de la défaite, heureuse pour lui, du mouvement sur les retraites de l'automne dernier, en ajoutant une louche de démagogie sur la préférence nationale à son discours sur la Sécurité sociale et l'immigration.

Ce pays va mal, ce n'est rien de le dire.
JMB

Résultats du 1er tour sur le canton de GRENOBLE 3

Résultats du 1er tour du 20 mars sur le canton Grenoble 3 : Hakim Sabri (EELV) en 2e position !
(nombre de voix suivi du pourcentage, en gras les qualifiés pour le second tour)

* Inscrits : 13 251
* Exprimés : 4 767
* PS, Pinot : 1 353, 28,38%
* Europe Ecologie Les Verts – Les Alternatifs, Sabri : 942, 19,76%
* FN, Grasset : 907, 19,03%
* Parti de Gauche, Bouzaiene : 572, 12,00%
* UMP, Xiberas : 551, 11,56%
* PC, Voir : 264,  5,54%
* Sans étiquette, Benyoub : 144, 3,02%

* Extrême gauche, Esnault : 34, 0,71%

samedi 19 mars 2011

Samedi-dimanche-lundi en une passe

Samedi 19 mars la Rue




Dimanche 20 mars le Vote
- Quel est le féminin de CANDIDAT en Isère ? ...
- SUPPLEANTE.

Cliquez pour agrandir
Dans le Canton 3 de Grenoble, où la gauche n'aligne pas moins de CINQ candidats dont deux se réclament du Front de Gauche,  la seule qui déroge à la règle candidat/suppléante, Anne-Laure ILLISIBLE, est une bleu marine au sourire Pepsodent.
C'est  ça le deuxième effet kiss cool en politique.
Pour ce canton et éventuellement pour ménager un avenir à la gauche de gauche, je rappelle aux étourdis, au mépris des règles d'encadrement de la propagande électorale que le ticket gagnant/gagnante est le 5.
Cette gauche-là, antilibérale, anticapitaliste, à déjà un mal de chien à se rassembler, ou au moins limiter la valse des étiquettes, et voilà qu'à peine arrivé au gouvernement Guéant, nouveau raciste sommital, l'éparpille encore.
[edit] Sur l'artifice scandaleux du sinistre de l'Intérieur pour faire disparaître le Front de Gauche des statistiques et des écrans dimanche soir, je vous renvoie à ce billet de Melenchon ici.

Lundi 21 mars les Cadences...
on ne change pas une formule qui gagne

mardi 15 mars 2011

Fukushima : ATOMCRAFT, NEIN DANKE !









Printemps 2011


Plus la brèche s'élargit sur les cuves numéro 1, 2, 3 ou 4 de la centrale de Fukushima-Daïchi, plus drus tombent les appels à rassemblement antinucléaire dans nos boîtes, à des dizaines de milliers de kilomètres. Et selon que les relais s'effectuent en trois sauts ou trois mille, vous appreniez hier 3 heures à l'avance qu' "un rassemblement est appelé devant Iter à Cararache",  à quand même 200 bons km de chez vous; ou qu' un autre était convoqué aujourd'hui en tout début d'après-midi à Greville centre et un peu partout en France,  flash mob géant au ptit bonheur la chance, dans un peu moins  de 2 heures. Celui-ci tombait d'on ne sait où, celui-là se prévaut des consignes du réseau Sortir du Nucléaire. Devant la catastrophe en marche, une partie de la France  twitte à qui mieux-mieux avec la rage de l'impuissance. Que pouvons-nous faire d'autre ?

Printemps 2023

Les Communes Libres de Paris, Lyon, Marseille, premières métropoles européennes dégoudronnées dans un pays dénucléarisé, sont rendues aux oiseaux, aux piétons et aux enfants, et rebaptisent solennellement leurs Places de la République respectives "Place Twitter"...
Rêvons. De toutes manières on a pas le choix.
 JMB

En bonus, l'excellent billet matutinal de  Guillaume Erner dans l'émission "Souriez, vous êtes informés" sur France-Inter* transcris par nous faute de transcription dispo sur le site du service public, et fautes d'orthographe incluses :

" Je sais pas si vous savez mais en France, pays du terroir, nous avons le nucléaire le plus sûr du monde. D'ailleurs avant de m'endormir j'écoute en boucle Anne Lauvergeon d'AREVA, qui nous explique que "il n'y a aucun problème, je crois qu'on va éviter la catastrophe nucléaire, et je voudrais d'ailleurs saluer le formidable sang-froid de toutes les équipes de Tepco. Ce sont des réacteurs qui même en cas de fusion de coeur, événement extrêmement improbable, hé bien il n'y aura pas de fuite dans l'environnement. (...) Il n' y a eu aucun problème, il y a eu une grosse polémique pendant un an en France, sur le fait que nos réacteurs étaient trop sûrs ".


Aaah ! si le nucléaire japonais était français, les japonais vivraient en ce moment même un grand moment de sérénité ! En tout cas chez nous ça y est, le débat fait rage, nucléaire or not nucléaire, c'est notre manière à nous de compatir aux souffrances et à l'angoissse niponne. Au train où vont les choses, nous allons voler au secours des jamponais en leur parachutant un gros stock d'autocollants qui fleurissaient dans les seventies : un petit soleil orange réjoui, avec un slogan écrit en écolo-teuton : "ATOMCRAFT, NEIN DANKE !".



Et pourtant à côté de ce débat sur l'utilité du nucléaire on pourrait en avoir un autre sur l'utilité d'avoir privatisé le nucléaire. Car figurez-vous que la société Tepco qui possède la désormais célèbre centrale de Fukushima-Daïchi est tout bonnement le premier producteur mondial privé d'électricité.


Hors, la catastrophe qui est en cours au Japon à pour cause une série de mauvaises décisions, dont celle de ne pas avoir noyé immédiatement les réacteurs de la centrale pour éviter de perdre ce précieux actif. Mais la société Tepco n'en est pas à sa première erreur. Cette entreprise à déjà falsifié une trentaine de rapports d'inspection de ses réacteurs nucléaires. Pire même, en l'espace de 25 ans c'est près de 200 incidents nucléaires que Tepco a cachés à l'opinion publique japonaise, pour préserver les intérêts des actionnaires. Hé bien je sais pas vous, mais moi ça me rassurerais qu'en France et ailleurs, les centrales nucléaires ne soient pas gérées par des Mickeys chargés de veiller sur les dividendes. Que Renault se fasse rouler, que les hamburgers Quick soient impropres à la consommation, ou bien encore que la Société Générale soit plaine de Kerviels, celà ne m'empêchera pas de dormir. Mais EDF, franchement, ça n'est pas la même chose. Et à ce sujet, je ne sais pas si vous êtes au courant mais en 2005, un gouvernement de gauche mené par un certain Lionel Jospin nous a expliqué qu'il fallait absolument privatiser EDF.



Avant, EDF appartenait aux français; ça ne pouvait pas continuer ainsi. Il fallait à tout prix qu'on se rachète EDF à nous mêmes. Eh bien la catastrophe en cours au Japon pourrait inciter ces actionnaires d' EDF à revendre leurs actions aux citoyens, ou pour le dire autrement, à renationaliser l'entreprise. Le capitalisme a inventé beaucoup de choses, les subprimes et les juckbonds, les obligations pourries. Pas la peine de laisser prospérer maintenant les actions radioactives. "
Guillaume Erner,  15 mars 2011
* F.I, "Souriez vous êtes informés" , du lundi au vendredi de 9h46 à 10h

###

 Voir les rassemblements antinucléaires organisés un peu partout en France.

mardi 8 mars 2011

Coup de coeur : Watcha Clan

Watcha Clan
électro-blues, français, arabe, hébreu, anglais : nomades avant tout !
(cliquez pour un extrait sur le lecteur de la Bobine)

mardi 1 mars 2011

Brice à la niche

Brice HORTEFEUX devient conseiller spécial de Sarkozy. Sa promotion, si s'en est une, ressemble surtout à une assignation à résidence à l' Elysée, où il attendra l'ouverture de ses procès pour injures racistes jusqu'à la présidentielle.

On se souvient qu'après la visite de cet ami de trente ans du président actuel, et le tristement célèbre "discours de Grenoble " l'été dernier, l'ex-ministre de l'Intérieur revenait à chaque nouveau braquage ou presque. Il veillait personnellement sur son dispositif sécuritaire exceptionnel mis en place à Grenoble après les "émeutes" du quartier de la Villeneuve à l'été 2010, et toujours piloté par un préfet particulièrement zélé, qui a été capable de laisser de 3 à 400 personnes, hommes femmes et enfants sans abri à la rue cet hiver.

On est pas prêts de le revoir à Grenoble : Mince consolation et bon débarras.

Dernier article

Contre le business des réseaux sociaux privatifs et leurs nuisances

Quatre ans après la première édition de ce texte en avril 2013 (!) les réseaux sociaux privatifs ont tout bouffé (dans l'espace pub...