vendredi 20 novembre 2015

D'outre-tombe

"Cette démocratie si parfaite fabrique elle-même son inconcevable ennemi, le terrorisme. Elle veut, en effet, être jugée sur ses ennemis plutôt que sur ses résultats. L’histoire du terrorisme est écrite par l’État ; elle est donc éducative. Les populations spectatrices ne peuvent certes pas tout savoir du terrorisme, mais elles peuvent toujours en savoir assez pour être persuadées que, par rapport à ce terrorisme, tout le reste devra leur sembler plutôt acceptable, en tout cas plus rationnel et plus démocratique."

"On peut remarquer que l’interprétation des mystères du terrorisme paraît avoir introduit une symétrie entre des opinions contradictoires ; comme s’il s’agissait de deux écoles philosophiques professant des constructions métaphysiques absolument antagonistes. Certains ne verraient dans le terrorisme rien de plus que quelques évidentes manipulations par des services secrets ; d’autres estimeraient qu’au contraire il ne faut reprocher aux terroristes que leur manque total de sens historique.

L’emploi d’un peu de logique historique permettrait de conclure assez vite qu’il n’y a rien de contradictoire à considérer que des gens qui manquent de tout sens historique peuvent également être manipulés ; et même encore plus facilement que d’autres".

Guy Debord, Commentaires sur la société du spectacle (1988)

lundi 2 novembre 2015

De Barbès à Bastille

 
Samedi 31 octobre 2015, Barbès-Bastille, à Paris.

Tu marcheras pour tous les morts pour rien, tués lâchement d’une balle dans le dos, tabassés à mort ou jetés dans un fleuve.


Tu marcheras pour la dignité humaine, pour croire encore que tu as le droit d’y croire.


Tu marcheras pour tous les opprimés, les discriminés ou méprisés, parce qu’ils/elles ne portent pas le nom qu’il faudrait porter, ou parce qu’ils/elles n’auraient pas « la bonne couleur de peau » ou parce qu’ils/elles n’habiteraient pas le bon quartier …


Tu marcheras pour les Arabes, les Africains, les Rroms, ceux qui aujourd’hui trinquent plus que les autres parce que désignés comme les bouc-émissaires de notre triste époque.


Tu marcheras pour les histoires du passé qu’on a si longtemps préféré ignorer au détriment d’autres histoires, comme si une hiérarchie devait prévaloir.



Tu marcheras pour croire qu’il est possible de changer les choses, de débattre en toute franchise, sans hypocrisie, pour aller de l’avant et ouvrir un autre champ des possibles.

Tu marcheras en espérant qu’un jour ceux qui ont tué gratuitement, lâchement, animés par la haine, soient jugés au même titre que d’autres, et qu’on cesse de leur trouver des excuses sous prétexte qu’ils seraient des hommes « assermentés. » 

Meyriem & Myriam en compagnie d'autres iséroises ;)

Tu marcheras pour que la loi qu’on dit applicable à tous, le soit enfin, sans faire de la loi une justice à deux niveaux.


Tu marcheras pour la dignité de ton père, Algérien, cuisinier de profession, mort à 49 ans, qui s’est tenu droit comme il a pu, arrivé en France à l’âge de 20 ans.
Tu marcheras pour la dignité de ta mère, Française, ouvrière en usine puis vendeuse de lingerie au Printemps, venue de son bourg de Picardie pour trouver de quoi mieux vivre à Paris, qui se foutait des sales pensées des uns ou des autres parce qu’elle vivait avec un Algérien. 

Tu marcheras pour tous les couples mixtes, tous ceux qui se sont aimés au-delà de ce qu’on nomme « les différences ».

Tu marcheras pour dire oui à la dignité, à la dignité de tous, oui.


Sandrine Malika Charlemagne

Crédit photos : lepartisan.info et Patlotch

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